Ulysses Saloff-Coste

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Statuts des populations et cités de l’Empire

vendredi 13 mai 2005, par Hervé de Laguiche, Ulysses Saloff-Coste


C avec 3 séances

Les pérégrins, étrangers. Diversité des statuts des cités. Inégalités des degrés d’urbanisation. Le pouvoir impérial a encouragé l’urbanisation parce que le développement de l’urbanisation est considéré comme un facteur de romanisation. Développer le monde des villes, intégration des populations. Tout le monde n’a pas les mêmes droits politiques et civils.

I.Les statuts

1.Le monde des esclaves

L’esclavage existe depuis des temps reculés. Des chiffres, ordres de grandeur : environ 80 millions d’habitants. Pour la péninsule italienne, 35% de la population est composée de « servi ». Alexandrie, 100 mille esclaves, 1 quart de la population. Sicile, Afrique du Nord, régions minières d’Espagne ou de Grèce. Beaucoup en Gaule méridionale, dans toutes les provinces orientales de l’Empire. Avoir des esclaves est commun. Acheter un esclave : entre mille et 2 mille sesterces. La guerre les fournit. Sous l’Empire, plus de révoltes d’esclaves. En 73-72 av, Spartacus est maté. 6 mille esclaves ont été crucifiés, pour montrer l’autorité romaine. Leur condition n’a pas changé. Il y a eu renforcement de l’autorité.
L’esclave est considéré comme un objet. Vieille conception des Grecs. La théorie de l’esclavage développée par Aristote. L’esclave est un instrument animé. L’instrument est un esclave inanimé. Auteur du Ier s, Varron nous explique qu’il y a trois types d’instruments : les instruments vocaux, les esclaves, semi-vocaux : les boeufs, sans voix, les chariots, matériel agricole, etc. Même conception de l’esclave considéré comme une chose. Droit de vie ou de mort. Pas de remise en question. Tacite, dans ses Annales, affaire en 61 sous le règne de Néron. Le préfet de la Ville, Pedanius Secundus, grande famille originaire d’Espagne. Il a été assassiné de nuit par un esclave. 400 esclaves. Ordonnance datant d’Auguste : massacrer tous les esclaves du maître. Un grand juriste prend la parole : si on ne punit pas, qui pourra se sentir en sécurité chez soi ? Émeute à Rome lors de l’exécution des esclaves. Néron a dû publier un Édit menaçant de châtiment tout révolté. Aucun droit politique. Il porte un sobriquet d’esclave. Sa condition est héréditaire. La condition se transmet, même s’il y a des possibilités d’affranchissement. Soit dans la maison d’un maître, la « familia », soit dans les domaines ruraux. Parmi les esclaves, il y a les esclaves impériaux, d’Auguste, « Augusti servi ». Ils vont peupler les bureaux administratifs. Il valait mieux être esclave qu’être libre et ne pas pouvoir se nourrir.

II.Les hommes libres

Les esclaves devenus « liberti », affranchis, libérés. L’affranchissement relève de la volonté du maître. Il y a les modes formalistes et ceux non formalistes. Trois types. Le premier type formaliste : par « vindicte ». On consulte un magistrat. Soufflet à son esclave, signe du renoncement de son pouvoir. Le magistrat est préteur, chargé des affaires de justice. Deuxième par testament. Troisième : par le cens. Le maître décide lors du cens, recensement des populations, que son esclave sera libre. Non formaliste : par lettre, par déclaration devant des amis. Auguste a voulu limiter le nombre d’affranchissement. Des lois ont été votées. Limites aux possibilités d’affranchissement. Première loi : 2 av, « Fufia Caninia » par Fufius Caninius qui limite les affranchissements par testament : 100. En 4 ap, la loi « Aelia Sentia » pose des conditions d’âge. Elle interdit les affranchissements d’esclaves de moins de 30 ans. Le maître ne peut pas moins de 20 ans. En 18 ap, la loi « Iunia ». accorde un statut particulier aux esclaves affranchis par les procédés non-formalistes. Statut de « latin junien » à ces esclaves. Un latin junien vit libre mais meurt esclave. Ses enfants sont esclaves. Quelle est la condition de l’affranchi ? Il suit la condition de son maître. Ce que l’on constate : la dénomination de l’affranchi s’inspire de celle du maître. Des liens demeurent tout de même entre l’affranchi et son ancien maître. Il y avait également des affranchis impériaux. Catégorie rencontrée : les « Augusti liberti ». Des empereurs comme Claude se sont appuyés sur les affranchis impériaux. Tremplin pour l’ascension sociale. Les ingénus, ceux qui sont de naissance libre. Les citoyens romains, « civus Romanus ». Citoyen, civitas. La citoyenneté s’acquière par la naissance. Les justes noces, mariage conclu dans les règles du mariage romain. La citoyenneté romaine s’acquière par la naissance. Si la mère est esclave, l’enfant est esclave. La citoyenneté s’obtient par concession spéciale de l’empereur.
Concession individuelle ou collective. A titre individuel, « viritim » (vir, homme). On parle de concession viritane. Il peut le faire de manière collective. L’empereur peut décider de rendre citoyen à titre collectif. Sous l’Empire, seul l’empereur peut le faire. Autre moyen, à partir de Claude, pour les non citoyens qui ont servi dans l’armée. Au bout de ses années de service, ces pérégrins sont récompensés au moment de leur retraite par la concession de la citoyenneté romaine. On a retrouvé des diplômes militaires. Plaques de bronze qui comportent cette concession de la citoyenneté romaine faite aux soldats qui ont pris leur retraite. Différentes façons d’obtenir la citoyenneté romaine.
Quels sont les droits et les obligations du citoyen romain ? Il a le droit de porter une dénomination caractéristique. Les trois noms. « Tria nomina » : prénom, nom et surnom. Le « nomen » ou gentilice. Le « cognomen » ou surnom. Le citoyen a des droits civils. Comme le droit de contracter un mariage légal : le « conubium », justes noces. Il dispose du « commercium », le droit de faire des actes juridiques, contrats de vente et d’achats. Il a le droit de plaider en justice, d’être cité comme témoin (testé).

Les citoyens romains ont droit de voter théoriquement mais en pratique, seuls ceux de Rome votent dans les assemblées de la plèbe. Droit de magistrature. Droit de servir dans la légion, de faire appel à l’empereur. Obligations : payer l’impôt. Les pérégrins sont des hommes libres non citoyens romains. Ils partagent les mêmes droits civiques que les citoyens romains mais n’ont pas leurs droits politiques. Ils n’ont pas les tria-nomina, mais un nom unique suivi de celui du père (patronyme).

Les mariages entre esclaves ne sont pas reconnus ; les enfants sont esclaves. Pour l’union entre un esclave et une femme libre, idem. Idem pour l’inverse. Entre pérégrins, mariage reconnu ; enfant pérégrin. Entre un pérégrin et une citoyenne, mariage reconnu ; enfant pérégrin. Entre un citoyen et une pérégrine, mariage reconn ; enfant citoyen.

III.L’empire, un agrégat de cités

On ne peut dissocier citoyenneté et communauté.

1.Les cités de droit romain

Deux sortes : la colonie et la municipe. La colonie est juridiquement une fondation nouvelle. La municipe prend la suite d’une communauté déjà existante. Installation de colons (soldats à la retraite) à la fondation de la colonie (généralement). Dans la pratique, il n’y a pas de différence entre une colonie et une municipe sauf le prestige du titre de colonie. Le colonies de droit italique ou « ius italicus » sont assimilées au sol de la péninsule italienne. Dispense de l’impôt foncier. Leur sol est assimilé à celui de la péninsule. Colonies très rares.

2.Les cités dites de droit latin

Droit apparemment attaché à une communauté et non individuel. Les habitants régulièrement domiciliés sont des pérégrins (contrairement aux citoyens des colonies ou municipes). Certains peuvent accéder à la citoyenneté en devenant magistrats municipaux (à la sortie de la charge) ainsi que leurs épouses et enfants. Avantage pour l’Empire : seuls les notables ou élites locales y accèdent. La société romaine est profondément inégalitaire mais pas fermée en « castes ». L’ascension sociale est possible. Il existe des colonies de droit latin et des municipes de droit latin.

Les empereurs peuvent l’accorder à des régions. Néron a accordé le droit latin au peuple des Alpes maritimes. Vespasien à l’occasion de la censure de 73-74 a accordé ce droit latin à toutes les cités de la péninsule ibérique.

3.Les cités pérégrines

Cités antérieures à la conquête romaine qui ont conservé leurs institutions. Le cas le plus répandu et le moins avantageux est la cité stipendiaire. Elle paie un tribut à Rome. Le stipendium est soumis à l’autorité du gouverneur de la province. Les cités libres ont la liberté de l’administration et des privilèges fiscaux. Leur liberté est reconnue et garantie unilatéralement par Rome. Les cités libres et fédérées ont un « foedus » ou traité avec Rome. Rome ne fait plus ce qu’il veut. Les cités libres immunes sont rares ; immunités fiscales.

Exemple province de Lusitanie (Portugal). Toutes les cités pérégrines sont stipendiaires. Dans les trois Gaule, il y a près de 60 cités ; 14 sont libres ou fédérées. Les autres sont stipendiaires. Les cités peuvent connaître des promotions juridiques. Romanisation.

IV.L’administration municipale

Les cités ont tendance à calquer leurs institutions sur celles de Rome et aussi la structure et les monuments « à la romaine ».0.On retrouve des organes plus ou moins semblables. Dans le courant du premier siècle, uniformisation de l’institution en dizaines d’années, tendance à calquer Rome. Trois grandes instances municipales : assemblées du « populus », des comices, le sénat et les magistrats. Assemblée du « populus » local, assemblée des citoyens domiciliés. Toute personne est rattachée à une cité. A ce titre, elle peut assister aux assemblées. Les grandes orientations de la ville. Elle élit les magistrats municipaux. Chacun vote avec une tablette. Au Iie s, les assemblées municipales continuent d’être réunies. Ces assemblées acclament les décisions du Sénat local ; rôle moins important. C’est une tendance sur une longue durée. Toute personne a une lieu d’origine ou « origo ». Il a une patrie juridique : Rome. On est nécessairement rattaché à une cité. Cette citoyenneté dont on bénéficie. Tout dépend du statut de la cité. En théorie, tout citoyen peut assister aux assemblées de Rome. Le conseil municipal est le « senatus » pour les régions occidentales. Pour la partie hellénophones, la « boulè ». Les membres sont les « bouleutes ». Le lieu est le « bouleuterion ». Pour l’occident, les « décurions » composent l’assemblée parce que la salle de réunion est la « curie ». Nombre variable de membres. Moins de membres pour les petites cités. Pline Le Jeune, originaire de Côme. Nous savons qu’il y avait cent décurions. Qui sont les les membres ? Ce sont des magistrats locaux. Ce sont des notables locaux. Ces décurions forment un véritable « ordo ». Les décurions forment une catégorie spéciale de citoyens ayant des droits et des devoirs spécifiques. Il faut un « cens décurional ». Pas de somme à verser, seulement niveau de fortune. A Côme, cens de 100 mille sesterces. « Album décurional », révisé tous les 4 ans ou chaque cinquième année. Ils décident d’engager des travaux publiques, monuments à ériger, lieux de spectacles (théâtre). Ils supervisent la perception des impôts. L’assiette se fait au niveau municipal. On descend dans la hiérarchie administrative. Vie religieuse. Le conseil délibère. Les décurions votent des « décrets » ou « dd », par décret des décurions. On rencontre des magistrats, hommes qui exercent une charge de manière collégiale et temporelle ; ici un an. Ils ne sont pas rémunérés. On peut être mise à contribution. Charge que les notables locaux gèrent. L’ensemble des magistratures constituent un « cursus honorum ». Les magistratures ou « honores » exercées pendant un an. Ce qui vient compliquer les choses, on rencontre d’autres types de charges dans les cités qui sont des services, prestations que des notables locaux acceptent d’assumer. Ils augmentent leur considération. Mais, ils ne constituent pas une étape dans leur carrière. Ces services sont appelés « munus, munera » (pl). Ça va être d’assumer les frais d’ambassades. Cela coûte cher. Relais, points de chute, service de courrier, logement à Rome. Fournir en huile ou en bois les thermes de la cité. Pour ce qui est des magistratures, on constate que dans la plupart des cités de droit romain ou latin,les magistrats sont au nombre de six. Collège de duumvirs ou duovirs. Ce sont les magistrats supérieurs de la cité. A ce titre, ils supervisent les affaires municipales. Ils président l’assemblée, le conseil des décurions. Chaque cinquième année ou quatre ans, on révise la liste des membres du conseil des décurions. Ils sont duumvirs quinquennaux. On rencontre deux édiles, locaux. Ne pas confondre les deux. Surveillance des bâtiments, les marchés, l’état des bains ; logistique, intendance municipale. Dans certaines cités, collège de « quattuorvirs » à la place des deux magistratures précédentes. Ils n’ont pas le titre de duumvirs. Les deux questeurs s’occupent des finances ; administration de l’argent de la cité. Il n’y a pas proconsuls ou procurateurs au niveau de cette hiérarchie. Pour être élu magistrat, il faut s’engager. Ce sont des charges un peu vénales. Il faut s’engager à verser une certaine somme au trésor de la cité. Le notable doit faire une campagne et promettre de nombreuses générosités. On a retrouvé sur certains murs, des slogans. Biens fonciers qui donnent leur revenu. Élite locale qui tient le pouvoir. Elle dépense pour ses concitoyens : à titre publique ou privé. Un notable est quelqu’un dont on ne remet pas en cause sa fortune parce qu’il en fait profiter. Dans les cités pérégrines, situation bien plus variée. Ces cités sont étrangère au droit romain. Athènes est une cité libre ; véritable enclave autonome. A l’époque impériale, magistrats dont les noms sont identiques à l’époque de Périclès : conseil de l’aréopage, archontes. Les suffètes.

IV.Les sacerdoces municipaux

Ces magistrats municipaux, dans le cour de leur carrière, sont appelés à gérer des prêtrises municipales. Culte publique pour des divinités. Prêtre chargés du culte, ce sont les mêmes hommes. Ici, ça fonctionne de la même façon. Que rencontre-t-on ? Des augures, chargés de prendre les auspices. Nouvelles prêtrise à l’échelle municipale pour le culte des empereurs morts et divinisés. Ce sont les flamines. On trouve des prêtres de Rome et d’Auguste qui sont chargés des célébrations en l’honneur de Rome, à laquelle est associée l’Auguste régnant ; anniversaire, celui de son avènement de l’empereur.

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