Ulysses Saloff-Coste

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Entre respect et évolution de la constitution | 2 | serments et insurrection

mercredi 29 mars 2006, par Ulysses Saloff-Coste


Le respect de la constitution va de soi. Sa norme serait supérieur à la loi. Mais, contrôle de l’exécution. Voir le contrôle de la constitutionnalité des lois.

Comment faire respecter la constitution ?
  Le chef de l’Etat
  Les députés
  Les fonctionnaires
  Les citoyens peuvent tenter de comprendre la constitution.

1/ Le serment

Le serment permet de promettre de respecter la constitution.

Dans la charte de 1814, le préambule explique que « nous nous engageons devant l’assemblée à être fidèle à cette charte constitutionnelle. Nous en jurons de la maintenir ». La charte et le préambule sont lus devant les sénateurs de l’Empire. 1/ C’est un serment de Louis XVIII de respecter la charte. 2/ C’est un projet de renouveler la promesse du sacre.

Art. 74. « Le roi et ses successeurs jureront dans la solennité de leur sacre, d’observer la présente charte constitutionnelle ». Chaque roi prête serment de respecter la charte. Louis XVIII réécrit la charte et met de côté la constitution proposée par les sénateurs. Le roi, comte de Provence, prête serment avant de devenir roi. C’est une constitution sénatoriale, avant la déclaration de Saint Ouen. Le roi est le garant de la constitution.

« Le serment sera réitéré dans la fidélité où le roi recevra le serment de fidélité des Français ». Les Français peuvent être difficilement réunis... Il y a bien une représentation plus ou moins nationale ; influence de la constitution sénatoriale.

Ce n’est pas précisé dans la charte, mais il y a bien serment de l’administration, des hauts fonctionnaires, députés et pairs.

Louis XVIII prête serment dans le préambule.

Charles X prête serment pendant le sacre. Il n’y a pas d’innovation dans cette étape du sacre. Il prête serment, malgré son image anti-révolutionnaire. Charles X ajoute le respect de la charte constitutionnelle.

Sous Louis-Philippe, il y a l’équivalent du serment de Louis XVIII. « Louis Philippe d’Orléans sera invité à accepter et à jurer les clauses et engagements énoncés. L’observation de la charte constitutionnelle et des modifications indiquées ».

Le 9 août, LP d’O prononce le serment. « En présence de dieu, je jure d’observer fidèlement la charte constitutionnelle et de faire rendre bonne et exacte justice et d’agir en tout chose [dans l’intérêt des Français] ». C’est par opposition à l’intérêt des royalistes.

Dans la charte, le serment n’est mentionné que pour le roi. Celui dont on se méfie est le roi. Louis XVIII rédige la charte, pour répondre à la méfiance d’une absence de serment. Cela peut aussi montrer la bonne volonté du roi... S’il prête serment, c’est bien que la simple promulgation ne suffit pas. Pour les successeurs de Louis XVIII comme le comte d’Artois, qu’ils ne se sentent pas liés à la charte.

Entre les chartes de 1814 - 1830, le roi est le principal danger pour la charte.

Pour la constitution de 1848, il y a aussi un serment. « je jure de rester fidèle à la république démocratique, une et indivisible et de remplir tous les devoirs que m’impose la constitution ».

Le serment est prononcé le 20 décembre par le président de l’Assemblée constituante. LNB dit en levant la main : « je le jure ».

Le coup d’Etat ne respecte pas le serment... « fidèle à la république démocratique, une et indivisible ». « remplir tous les devoirs ». Le serment n’est pas aussi clair que la charte de 1814. Dans les devoirs, il y a les limites comme la dissolution de l’assemblée. Mais, il y a aussi les arrestations à côté. Victor Hugo insiste sur la violation du serment. Balladur : ‘premier ministre ne souhaite pas être président de la république’.

Art. 74 est repris dans la charte de 1830. Il n’y a plus la solennité du serment « jureront en présence des chambres réunies [à la place de Dieu], d’observer fidèlement la charte constitutionnelle ». Il y a changement de rédaction. C’est le même principe.

La constitution de 1852 ne prévoit pas de serment du chef de l’Etat. Napoléon III ne s’impose pas un serment d’une constitution choisie. A la différence des chartes, « les ministres, les membres du Sénat, du corps législatif et du conseil d’Etat, les officiers de terre et de mer, les magistrats et les fonctionnaires publiques prêtent le serment ainsi conçus : ‘je jure obéissance à la constitution et fidélité au président’. Maintenant, on ne se méfie plus du chef de l’Etat, ce sont des parlementaires et des ministres qui sont la source de méfiance. La constitution et le président sont à respecter. Comme république décennale, il faut prêter un serment au nouveau président. Il pourrait être d’un parti différent.

Avec l’Empire, le serment devient politique, à l’empereur. Le serment est au service de l’Empire. Au XIXe s, respecter une constitution, c’est un acte politique. Il n’y a pas de consensus sur la constitution. C’est accepter la victoire d’un camp, mais pour l’Empire il est unique... De nombreuses personnes sont mises de côté si leur avis est différent. La fidélité va au-delà du respect présidentiel. Le serment est trop personnalisée.

Il y a les magistrats qui doivent prêter serments, bien qu’ils soient indépendants. La conséquence est qu’il y a épuration ou de restriction mentale pour ceux qui prêtent serment. C’est une manière de limiter l’initiative personnelle.

Les députés élus doivent jurer fidélité à la constitution et au président. Les Républicains ne prêtent pas serment. Ils ne siègent pas à partir de 1852.

En 1857, il y a débat entre la ‘génération de 1848’ (respect de l’égalité). Ils pensent que l’on ne peut pas prêter serment. Cavaignac est encore candidat. Une nouvelle génération de républicains avec Emile Olivier, principal personnalité de la tendance. L’autre fraction considère qu’il faut prêter serment pour pouvoir siéger. Il y a les sermentistes et les asermentistes. Certains ne veulent pas se rallier au régime et d’autres préfèrent prêter serment. En entrant dans le régime, destruction de l’intérieur, tout en respectant la constitution. C’est une opposition plus pragmatique que celle absente en 1852 et modérée.

Pour le parti républicain, les deux types de Républicains s’opposent ; division du parti républicain. Le serment a tout de même des conséquences sur la politique. Les asermentistes, même élus, n’ont pas siégé. Finalement après les élection partielles, en 1858, 5 députés républicains sermentistes sont élus. Emile Olivier gagne face à un asermentiste.

Le régime a des candidats élus mais qui préfèrent ne pas siéger en 1852. En 1857, il y a élection partielle. Le pouvoir crée une opinion partielle.

Le 19 février 1858, le serment est demandé non pas aux députés, mais aux candidats. La pluralité des candidats est encore restreinte. Maintenant, le candidat est obligé de prêter serment. Seuls les sermentistes peuvent se présenter. La ‘profession de foi’ est le programme. « nul ne peut être élu, si 8 jours au moins avant l’ouverture du scrutin, il n’a présenté un serment écrit ». L’annonce de candidature est encore un moyen pour que l’on parle du candidat. Le serment de l’art. 14 est repris. L’affichage et la publication sont impossibles avant le serment.

La constitution de 1870 reprend l’art. 14 de 1852, devenu art. 21. Le ‘senatus consulte’ de 1868 n’est pas abrogé en 1870. La règle du ‘SC’ de 1868 est maintenue. Les membres du corps législatif prêtent le serment.

Pour la 3ème république, il n’y a pas de serment trouvé dans le texte constitutionnel.

Les serments ne sont pas suivis avec les révolutions. Les fonctionnaires prêtent serment au régime qui suit. Une partie peut refuser de collaborer. Il y a certain républicain avec Napoléon III. La disposition du serment est faible face au renversement de la constitution. La 3ème république préfère ne pas introduire de serments pour des fonctionnaires qui valsent.

2/ Le droit d’insurrection

Pour la charte de 1814, le 15 mars 1815, une loi est votée. Art. 4 : « le dépôt de la présente charte constitutionnelle et de la liberté publique est confiée à la fidélité et au courage de l’armée, des gardes nationales et de tous les citoyens ». C’est plutôt une invitation à s’opposer à la tentative de renversement du régime. Il s’agit en mars 1815 de protéger le régime face aux 100 jours de Napoléon.

La monarchie est la liberté face à Napoléon qui est l’arbitraire. Il vaut mieux parler des gardes nationaux et des citoyens, plutôt que de la garde royale et des fidèles sujets. On demande aux citoyens de s’opposer passivement ou activement par la force, les barricades.

La charte de 1830, art. 66 : « la présente charte et tous les droits qu’elle consacre, demeure dans le patriotisme [civique, non pas économique ; au lieu de fidélité au roi] ».

Il s’agit de garantir les conquêtes de la révolution de 1830, et l’ensemble de la charte. La révolution de 1830 s’est effectuée par le souhait de mieux garantir la charte. Confirmation de la révolution de 1830. L’ancienne garde nationale, supprimée en 1827. Avec Charles X, risque. C’est une mesure de dissuasion. On peut se demander s’il y a un droit à l’insurrection. C’est une sorte de menace pour louis Philippe si l’idée d’outrepasser la charte lui vient à l’esprit.

Pour la constitution de 1848, c’est l’art. 110 : « l’assemblée nationale confie le dépôt de la présente constitution et des droits qu’elle consacre à la garde et au patriotisme de tous les Français ». Le « droit à l’insurrection » est présenté dans les constitutions des années 1790.

Application lors de la dissolution de l’assemblée. Les citoyens ne sont pas non plus incités à prendre les armes. Si les citoyens se réunissent, qui peut dire que la constitution n’est pas suivie.

« Aucune troupe étrangère ne peut être introduite sans le consentement de l’assemblée nationale ». La garde nationale est la garde du régime ; volontaires. Ils participent à la fondation du régime. On montre une méfiance envers l’armée par peur que l’armée soit liée à des révoltes possibles. On pense aux gardes étrangers. Postulat des constituants : ‘la révolte serait aidée par des mercenaires’. L’assemblée nationale autorise la présence des armées étrangères. Il s’agit de troupes au service du président de la République.

Dans les constitutions de 1852 - 1870 - 1875, la rue est source de méfiance. Les Bonaparte sont attachés au suffrage universel. Dans les années 1870, les monarchistes viennent de vivre la commune. On ne veut pas donner de prétexte à l’insurrection.

En 1815, les citoyens, l’armée, les gardes nationaux n’ont rien empêché. Au retour de Napoléon, le ralliement se fait calmement.

En 1830, Charles X prend des mesures législatives. Les lois sur la presse, sur les élections, sont modifiées. L’interprétation de l’art. 14 a été mise en cause par les opposants. Cela provoque l’insurrection. Charles X était-il dans l’esprit de l’art. 14 de la charte ?

« Le régime légal est interrompu. Celui de la force est commencé. Charles X n’a pas mis l’armée dans la rue. « l’obéissance est un devoir ». On appelle à une protestation passive. « Nous pouvons la supplier de s’appuyer sur son droit [face à l’inégalité], de résister à la violation des lois. » C’est une affirmation de la charte. L’obéissance devrait cesser... Mais, quel est le type de résistance ? On insiste sur l’inégalité du régime de 1814. ‘Nous, les journalistes, résistons face à l’interdiction de presses non résistantes’. Ce sont ici les journalistes libéraux et non pas légitimistes qui protestent.

« Les soussignés se regardent comme obligés par leur devoir et leur honneur de protester. Les dites mesures, contenues dans les ordonnances du 24 juillet. (...) contraires au droit public des Français, aux attributions, aux arrêts des tribunaux », etc. (...) « les soussignés fidèles au serment, protestent (...) la chambre » Certains changent leur fusil d’épaule au bon moment. Charles X a perdu les élection. Les 4 ordonnances interviennent. Charles X dissout la chambre élue et refuse les résultats de l’élection. La chambre n’existe pas encore. Il faut qu’il y ait une séance, pour que la chambre existe juste pour être dissoute. L’ordonnance de nouvelles dissolutions est mise en cause. « La tentative de former une autre chambre est en contradiction avec les droits acquis des électeurs ». L’ordonnance est considérée comme contraire à la charte. Elle n’a pas été votée par les deux chambres. Le cens à 300 francs n’est pas violé par l’ordonnance. Le cens est calculé différemment de la loi Lainé de 1817.

Les barricades apparaissent. Charles X cède. Le 29 juillet 1848, une ordonnance rapporte les 4 ordonnances. Le soulèvement populaire oblige Charles X à respecter la charte. Tout est entré dans l’ordre constitutionnel parce que les ordonnances sont retirées. Mais, Charles X agit trop tard. Les députés et les insurgés ne respectent pas la charte et destituent Charles X. Le duc d’Orléans devient lieutenant général du royaume, puis roi des Français. On parle de violation de la charte constitutionnelle au moment où Charles X tente d’agir. La destitution de Charles X est une sorte de sanction. La destitution du roi n’est pas prévue par la charte de 1814. La révolution de 1830 souhaite défendre la charte de 1814, et pourtant la légalité n’est pas respectée. La force et la violence, malgré un souhait de respect, prennent la place à la légalité.

En février 1848, il y a une insurrection dirigée envers Guizot. Le roi est renversé. Le roi est légitimiste. Louis Philippe est le roi “légitimisé” par la charte de 1830. Guizot est le président du Conseil, “légitime”. La revendication initiale est la réforme de la charte. Il y a abaissement du cens. Il y a aussi la contestation de la corruption des électeurs. L’insurrection “souhaite” réviser la charte. La révolution de 1848, à la différence de 1830, n’a pas le prétexte de la violation de la charte.

Les gardes nationales sont appelés à contenir les émeutes. Mais, ils sont favorables aux revendications des opposants. Il y aurait un nouvel abaissement du cens par rapport à 1830. Ils refusent de tirer sur les émeutiers. Mais l’armée ne réprime pas l’émeute. Les gardes se retrouvent mélangés avec les “émeutiers”. La majorité n’a rien fait pour s’opposer à la révolution. Les citoyens sont passifs face au renversement du roi et de la charte. C’est le résultat de refus de réforme par le roi.

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