Ulysses Saloff-Coste

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Humboldt et monde sensible

vendredi 28 avril 2006, par Ulysses Saloff-Coste


La tâche de l’historien
W. Von Humboldt
Discours présenté à l’Académie des Sciences de Berlin
Traduction française par A. Laks.

[// Résumé des épisodes précédents]

Humboldt récuse la conception de l’histoire par la philosophie. Dans l’article sur la tâche de l’historien, il aborde la démarche de l’histoire. Méthodes précises et techniques opératoires.

Tenter d’expliquer l’histoire par ses forces motrices. Circonstances, situation, intervention. L’historicité est animée et complexe pour Humboldt. La réalité est composite. La réalité historique reprend la nature des chose. La matière des choses est scientifique et elle prend en compte l’homme. Il y a aussi la liberté de l’homme. Il y a ensuite l’intervention du hasard.
  nature des choses,
  liberté de l’homme
  hasard

La liberté de l’historien permet de penser l’action des humains. Le hasard et la liberté permettent d’échapper au déterminisme. On est pas déterminé par ce qui nous précède. Sans liberté, il n’y a pas de création esthétique.

Le hasard est à prendre en compte. Pour Humboldt, l’historien doit repérer le hasard. Il peut en rendre compte à l’échelle d’une ethnie ou d’une société, ou encore des circonstances. Non pas de son point de vue.

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L’histoire en démarche de connaissance.

« la tâche de l’historien est d’exposer ce qui s’est produit ». il a une conception complexe de la réalité. Quand Humboldt parle de “conception plus pure”, cela veut dire qu’il faut être soucieux de la réalité et de sa logique. L’historien est tenu à l’exhaustivité des données. Même si on ne peut pas fouiller tous les sites, les sources sont classées.

« la simple exposition est en même l’impératif premier auquel il ne saurait renoncer et elle est à la fois la réalisation la plus haute ». L’historien, après ses recherches, publie un récit, une synthèse. Mais cette exposition est un idéal (la plus haute). Idéalement, si c’est possible d’exposer la situation, on aurait accès à la réalité historique.

« mais ce qui n’est visible dans le monde sensible que pour une part, le doit être ressenti, conclu, deviné de surcroît ». Même en vivant dans la période étudiée, on ne peut pas tout observer. On relève et décrit. L’historien est toujours après coup et reconsidère les choses. Il tente de comprendre ce qui a eu lieu. On doit déjà analyser, au-delà des apparences. Ce qui apparaît est dispersé. Reconsidérer l’ensemble des choses.

Tirer les arrière plans du texte. Pouvoir commenter le texte. Pouvoir reprendre les commentaires. Avec l’épistémologie, les historiens se demandent : qu’est ce que c’est de faire de l’histoire ?

Idée des forces motrices. Poser les données. Elle ne sont comprises que si on cherche les liens internes. Dans un cours, si on plonge dans les éléments, la réalité historique peut être affinée. A un moment, on se donne un critère pour arrêter d’investiguer. Avec les données, on peut chercher un déterminer les informations déterminantes.

« rien ne témoigne plus d’un esprit sain, ordonné et capable de trier avec discernement, ni d’une disposition intérieure et libre ». Dire ce qui s’est produit, c’est dire la réalité historique. Il prend l’image des nuages. Avoir le juste positionnement sur ce qu’il regarde. Par l’image des nuages, il parle des formes reconnues selon que l’on est historien ou poète. « la vérité historique ressemble dans une certaine mesure aux nuages, qui ne prennent forme qu’à une certaine distance de l’œil ».

Humboldt évoque les traditions. Il est féru de l’histoire de l’art, de l’histoire de l’antiquité. La recherche est l’ajout de travaux. Il y a un croisement entre la recherche et les sources. Données archéologiques et philologiques. Les faits historiques sont tenus pour vrais, car il sont vraisemblables.

Les faits historiques s’insèrent dans la connexion des touts. C’est une connexion critique. Il y a la pensée de Kant : critique de la pure pensée pratique. Il ne suffit pas que les faits historiques soient vraisemblables d’un point de vue géologique. Il faut qu’ils soient logiques, non pas rationnels. « en rester là reviendrait à sacrifier la vérité authentique, intérieure, et fondée dans la connexion causale, au profit d’une vérité extérieure, littérale et apparente, à commettre volontairement certaines erreurs pour prévenir le danger d’erreurs encore incertaines ».

Charles Browning, “les hommes ordinaires”. Les commandos ramassent les populations juives et les tuent par un coup de pistolet en plaçant les personnes en file. On est dans l’invraisemblable. Les agents n’ont pas d’explication. Rencontre d’une voisine de Hambourg et discussion. Plus loin les personnes sont tuées en file. La voisine est tuée quelques minutes après. C’est invraisemblable. Les génocides ont lieu. On peut pas expliquer psychologiquement. On doit prendre le critère de la liberté de l’homme. Donner les informations complexes de la société. Avoir une vision plus générale de ce qui advient. Comment c’est advenu ?

Travailler sur l’animation des éléments historiques les uns par rapport aux autres. « la vérité de tout ce qui s’est produit repose sur l’ajout de la part, déjà mentionnée, qui en chaque fait reste invisible ». Ce que l’on comprend après coup. L’histoire, ce qui advient.

« [l’historien] possède une activité autonome et même créatrice, non qu’il produise ce qui n’existe pas, mais parce qu’il donne forme, par ses propres forces, à ce qu’il ne pouvait percevoir tel qu’il est réellement par la simple réceptivité ». L’historien a une activité créatrice. Créateur ne veut pas dire inventeur. Chez Michelet, il y a une verve lyrique. L’historien donne forme après à ce qui s’est produit. L’historien prend en compte la réalité de l’hasard. S’il le compare à un poète, cela ne veut pas dire qu’il versifie pour autant.

Accepter le moindre point de contact paraît dangereux. « [l’historien ne peut y parvenir que par l’imagination] ». Quand on voit un cube, on ne voit qu’une partie du cube. Quand on voit un morceau orthogonal qui s’approche d’un cube, on l’associe à un cube. Avec les capacités cognitives, on définit l’objet comme étant un cube. L’historien, avec son imagination, peut comprendre à quelle “forme”, il a affaire.

L’historien vérifie les données auxquelles il a accès. Pour conclure, on doit faire appel à l’imagination. Sinon, on ne passe pas au récit de l’histoire. « il subordonne [l’imagination] à l’expérience et à l’investigation de la réalité ». Avec la forme du sonnet, le compositeur écrit un sonnet. Mais, l’historien reprend des éléments. Des historiens peuvent trouver de nouveaux éléments pour apporter de nouveaux récits. [Marrou ?] a inventé l’antiquité tardive. C’est une manière de défendre l’antiquité et il la valorisait pour elle même. La période est valorisée et n’est plus regardée comme le déclin de la période qui la précède.

Pour être un bon historien, il faut beaucoup lire et faire confiance à son expérience des situations. Appel à la maturité dans les relations. Il faut être subjectif au sens où notre expérience du monde permet de regarder le monde.

L’histoire est une connaissance et va plus loin que l’imagination. « si on atteignait intégralement [la vérité], nous serait dévoilé en elle, ce qui conditionne, en tant que chaîne nécessaire, toute réalité ». La sagesse pour Humboldt, Henri-Irénée Marrou, Marc Bloch, l’auteur de “les choses avant les dernières choses dans l’histoire”.

« il faut donc pour s’approcher de la réalité historique emprunter deux voies :
  l’investigation rigoureuse, impartiale et critique de ce qui s’est produit
  la synthèse du champ exploré, l’intuition de tout ce qui ne se laisse pas atteindre par ses autres moyens

L’analyse est de l’ordre d’une monographie. La synthèse consiste à écrire sur des vues d’ensemble ou des généralités. On se méfie de la généralité et que ce serait superficiel. Qu’est-ce que c’est que la connaissance historique, l’écriture historique ?

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